Plusieurs personnes m’ont interpellées par rapport à mon précédent post ; moi qui me dit féministe jusque dans mes orteils, j’organise un tricot-maman ? Mais ça va pas la tête ?
Elisabeth Badinter aurait-elle donc raison ? Est-ce qu’on revient vers les anciennes valeurs de maman qui s’occupe de son gamin et qui tricote un slip pour son mari (léopard, le slip, siouplé)?
A cette dernière question, il y a deux réponses possible.
La première étant : bah bien sûr que non qu’on ne revient pas en arrière, on va de l’avant! Le féminisme a fait un tel boulot que maintenant, je peux faire ce que je veux comme je le veux. J’aime le tricot, j’aime le crochet, j’aime mon enfant, j’aime sortir. Que faire ? Je prends mon gamin, mon tricot et mes chaussures de marches et je sors retrouver les copines pour crocheter ensemble. Le tricot c’est pas vieux-jeux, c’est hype voyons !
La deuxième étant : bah bien sûr que oui ! Le féminisme n’a pas fait un super boulot dans la libération de la femme, je ne peux pas faire ce que je veux quand je veux donc je passe au plan B.
Comme le féminisme m’a donné le droit de travailler mais n’a rien changé dans le sens de responsabilité des hommes, je travaille comme une malade et je rentre pour faire encore plus de boulot à la maison. Je dois être parfaite sous toutes les coutures car les hommes vont nous le faire payer notre droit au travail !
Qui de plus est, la société n’est pas du tout dirigée vers les nécessités des femmes qui ont une famille et un travail à temps complet donc comment je fais, moi, pour me détendre, avec mes amies ? Bah je m’organise, voilà !
Après la première vague et la deuxième vague féministe, la troisième vague est bien plus compliquée à gérer. Nous avons acquis beaucoup de droits sur papier mais avons encore du mal à les gérer et à les faire accepter.
Oui nous avons le droit de vote mais ce n’est pas pour autant qu’il y ait suffisamment de candidats qui défendent nos causes.
Oui nous avons obtenu le droit à l’avortement mais nous nous faisons toujours juger lorsque nous avons une pilule qui n’a pas fonctionnée.
Oui nous avons droit à une sexualité contraceptive mais la glorification de la sexualité parfaite nous incite à une performance irréprochable.
Oui on a plein de droits partout mais commen se fait-il que les femmes de couleur ont encore plus de mal que les hommes de couleur pour s'intégrer? Comment se fait-il que les lesbiennes sont encore plus harcelées que les homosexuels?
Oui nous avons le droit de nous habiller comme on le veut mais les médias n’hésitent pas à stigmatiser les victimes de viol en minijupes (en même temps qu’elle banalise et encourage le viol).
Oui nous avons le droit d’être présentes partout dans la vie politique, professionnelle, sportive, médiatique mais à la moindre erreur nous recevons de lourds jugements et critiques, dirigés en premiers lieux sur notre physique (Elle est moche Lady Gaga ! Elle ressemble à une camionneuse, Amélie Mauresmo ! Mais comment elle se sappe, Fadéla Amara).
Oui on a des réseaux qui protègent nos droits en tant que femme battue, mais les hommes battus sont ridiculisés et honnis.
La liste est longue.
Pour être bref, la troisième vague du féminisme, dans laquelle nous nous trouvons actuellement, en est une qui est en premier lieu philosophique. La majorité des droits ont été acquis. Maintenant, il est temps de faire accepter, respecter et appliquer ces droits en tant que tel, en tant que droits entiers. Dans toutes les parties de la société, y compris si nous voulons nous retrouver en tant que femmes pour faire des choses qui nous paraissent vieux-jeux ou obsolètes.
Le bon boulot a été entamé, finissons-le maintenant !
7 commentaires:
Jolie mise au point, le féminisme c'est avant tout avoir le droit de faire ce que l'on veut sans être jugée et c'est bien là dessus qu'il y a le plus de boulot.
Dommage que je sois si loin de Paris, je serais bien venue à ce gouter !
Continue ce que tu fais, saches que tu motives d'autres personnes à en faire autant.
Bonne continuation et bon gouter !
Mooglosaurus je te dois des excuses car j'ai eu mon quart d'heure de mauvaise humeur hier sur ton blog; ça m'a rendue mal par la suite et je me suis trouvée nulle mais c'est parti tout seul : les mères débordées occupées avec les enfants et le tricot ou le crochet , avec l'image 50, et paf il m'en fallait pas plus et j'ai eu mes vapeurs !
j'aime mes enfants, mes copines et le tricot, et je suis bien d'accord que c'est la hype en plus, donc finalement je suis d'accord avec toi mais la société retourne carrément à l'ère de Pompidou en ce moment et j'ai craqué ! PARDON ! Bon tricot et bon goûter ! ( et bon courage au patron du café !!!)
Amen !
@ carnet: merci, ton message me touche beaucoup. J'espère toucher les personnes qui en ont besoin surtout. J'espère qu'on aura l'occasion d'en parler de vive voix un jour.
@ Lucile: mais tu ne me dois aucune excuse, tu es folle? Au contraire, tu m'as donné le prétexte idéal pour parler de tout ça. Et tu n'es pas la seule à me l'avoir dit, que le tricot & les bébés ça ne colle pas avec le féminisme! Je te remercie, justement!
J'espère que cela pourra se faire.
J'aurai bien besoin de deux ou trois leçons de crochet :D :D :D !!!
En mai 68, j'étais en 1ère au lycée (juste pour pas dire mon âge, lol). Pour aller vite, on va dire que je fais partie de cette première génération qui a eu accès assez facilement à la pilule, même si au début c'était sur carnet à souche. Notre combat féministe passait par la contraception "un enfant si je veux, quand je veux". Avouer alors qu'on tricotait, même peu, c'était ... juste pas possible ! Peut-être que votre génération peut maintenant le clamer haut et fort, et en être fière, parce que les combats basiques (contraception, boulot par exemple) sont maintenant gagnés (avec des réserves, OK). Quel homme trentenaire dira aujourd'hui à sa chérie "je veux que tu restes à la maison, que tu ne travailles pas" (trèèès drôle ...) ? Et quelle chérie ne discutera pas cet oukaze ?
Ceci dit, c'est vrai que ma génération n'avait pas terminé le binz, et qu'il reste des combats à mener. On vous les laisse, les filles, nous on va essayer de profiter -c'est pas gagné- d'une retraite bien méritée, on est un peu fatigué.
Bon courage à vous toutes.
@ Carnetdetoile: je peux donner des cours privé s'il le faut, si tu me payes un chocolat chaud chez Angelina ^^
@ Zigomar: merci pour ce très beau commentaire. Je suis heureuse de lire ce que tu écris. Ca m'explique un peu pourquoi le crochet & le tricot sont labélisés en tant que anti-féministes... Tu peux te reposer, je suis là avec nombreux d'autres féministes (hommes et femmes). Mais tous les encouragements sont les bienvenues ^^
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