jeudi 24 mars 2011

Soyons tendance, soyons mère indigne

Ca fait trois ans et demie que je suis maman et ça doit faire environ deux ans que je me rends compte du fabuleux phénomène des mères indignes.

Je m’en suis d’abord rendu compte aux US, où une vraie guerre est établie entre les « good mothers » et les « bad mothers » et maintenant je me rends compte que cette guerre est belle et bien présente en France. Autant sur la toile que dans les magazines, on entends parler de ces « mères parfaites » qu’on déteste. Moi-même j’ai mon exemple type de la maman nutella et de la maman habillée en minijupe haute couture qui n’arrive pas ramasser son mioche car sinon on va voir sa culotte (mwarf). Et il est de bon ton de détester ces mères parfaites. Et il est de encore meilleur ton de se revendiquer ou de s’assumer « mère indigne ».

Mais est-ce que c’est bien une bonne idée ?

D’où vient ce sentiment de devoir se justifier de faire des erreurs ? Hein ? S’il y a tant de mères indignes qui gueulent, bloggent, débatent, c’est qu’elles se sentent oppressées par les mères parfaites, non ?
Dire qu’on n’est pas une mère parfaite est en être soulagée en comprenant que la perfection est inutile dans la maternité, c’est une chose. Créer un label « mère indigne » pour déjouer les plans diaboliques d’une « mère parfaite virtuelle », c’en est une autre. Ca ne fait que rajouter une case au concept de la maternité et ne fout que la pression pour celles qui se sentent obligées de choisir de camps. Un label glorifie l’autre tout en l’invalidant…
Si les mères indignes crient aussi fort, c’est qu’elles se sentent mises en danger par les mères parfaites, par les médias et leur image de la maman parfaite, par les femmes qu’elles voient dans la rue, dans un bistro, sur une affiche,… Mais à quoi bon accentuer cette image inatteignable de la maman parfaite en implorant le concept de la mère indigne ? Et surtout, en quoi la mère parfaite est-elle aussi dangereuse ?

Brandir aussi violement le concept de la mère indigne, personnellement, je trouve que ça ne fait que renforcer ce concept de la mère parfaite qui effraye tant de gens.
Est-ce qu’il ne serait pas plus judicieux de tout simplement accepter ce qu’on est : une mère parfaite (omg!) ? Chacune d’entre nous est parfaite sous toutes ses coutures, dès l’instant où on ne mets pas la vie de notre enfant en danger. Chacune de nous (sur)vit avec son enfant tant bien que mal, avec les outils qu’on lui a donné et avec l’énergie qu’il lui reste.
A quoi bon justifier sa culpabilité à chaque erreur avec un « hihi huhu hoho voilà moi aussi je suis une mère indigne, j’ai mis la culotte de ma fille à l’envers », mieux vaut juste faire son truc et se foutre du reste, non ?

Vous me direz que de revendiquer un terme négatif pour dénoncer une injustice, ça a déjà prouvé son efficacité. Si nous n’avions pas eu nos fameuses salopes, la légalisation de l’IVG aurait pris plus de temps, par exemple. Mais là, ici là maintenant, là, est-ce qu’il y a ce type d’urgence qui nous impose de bousculer les mœurs en hurlant à l’injustice de la mère indigne ? Si oui, pourquoi ne pas se mettre à revendiquer d’autres termes insultants, pourquoi chaque femme violée ne revendiquerait-elle pas le terme de salope, justement ? Ou les « rondes », ne serait-elle pas temps qu’elles revendiquent le fait qu’elles sont grosses ? Ca tombe bien, j’ai toujours rêvé qu’on m’adresse la parole en tant que « eh, toi, là, là grosse salope indigne », youpi !

On s’indigne de certaines insultes mais on brandit d’autres insultes comme des épées,… à même combat armes différentes ?

La vérité absolue c’est que nous avons toutes nos moments de doutes, d’erreurs, de nervosité, de questionnement. Et que nous avons toutes nos moments de gloire, d’épiphanie, de béatitude envers nous-même. De ces deux extrêmes, pourtant, la majorité des mères préfèrent se focaliser sur l’indignité des erreurs commises (qui a dit, d’abord, que c’était une erreur que de faire dormir loupiot dans un panier de linge sale ?), plutôt que de confirmer sa joie pour ces moments de perfection. C’est pas un peu con, ça ?

Enfin voilà, je n’aime pas le concept de la mère indigne qui fleurit depuis quelques années, je le trouve misogyne, je trouve qu’il ne consolide que la perfection de la maman photoshopée qu’on essaie d’imposer aux femmes. Déjà, soyons qui nous sommes : des femmes fabuleuses, des mères géniales et des épouses resplendissantes. Le challenge, c’est d’accepter notre perfection et non de dénoncer perpétuellement nos défauts. De toute façon, nous sommes toutes les mères parfaites de l'une et les mères indignes de l'autre, non? ^^





Ah… une dernière question dans ce concept de la mère indigne mes fesses là :

Il est où, dans les médias, sur la toile ou dans votre lit, le père parfait ? Hmmm ?

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9 commentaires:

Titsev a dit…

Je ne sais pas si je suis une mère indigne ou parfaite, je dirai juste que je suis une mère tout court! Avec son lot de perfections et d' imperfections, avec ces jours ou l on adore ses enfants et d' autres ou l on est tellement fatigue que l on oublie cet amour...
Perso, les mères que je trouve parfaites sur la toile, je les ai retirées de ma blig'liste, trop marre d' être complexée devant les bouilles lisses de leurs enfants (a se demander si le nutella tachait parfois les fringues...) leur intérieur toujours ultra cleen et les e-boutiques quelles avaient le temps de monter...
Le conseil qu'il faudrai que toutes les mères gardent en tete: faites vous confiance! Vos enfants ne seront jamais parfaits mais nous non plus ne sommes pas parfaits!
Et le Pere parfait? Moi je lai chez moi, même si avec ma fatigue actuelle j'ai tendance a l oublier...

Odds'n'Ends a dit…

Perso, je me sens et me revendique totalement mère indigne. Et je n'ai vraiment pas l'impression de renforcer le stéréotype de la mère parfaite pour autant. Je suis mère indigne dans la mesure ou en effet je ne fais pas tout comme il le faudrait, que mes enfants ont une DS qu'ils voient plus que moi certains jours, qu'il m'arrive d'acheter des lasagnes congelées certains soirs (la liste est trop longue, je fais l'impasse). La mère indigne existe à Paris et elle est fun. En banlieue (en tout cas en Seine et Marne), elle est une loseuse qui ne s'occupe pas bien de sa progéniture. On n'invite pas ses mômes aux anniversaires, on l'évite lors des sorties scolaires et on cause dans son dos entre mères parfaites (c'est du vécu...). Alors oui, j'ai des piercings, je joue du métal hard-core, j'ai des amis pas présentables mais mes enfants sont propres et bien élevés. Eux au moins disent "bonjour, merci, s'il te plaît", même si je ne suis pas celle que certains voudraient. Je me vis indigne comme je me vis grosse et salope. Et je préfère m'attribuer ces qualificatifs plutôt que de laisser ce soin à la société.
Bien loin de l'image que tu sembles en avoir, les mères toutes bien comme il faut, il en existe des kilos qui n'ont absolument aucune tendresse pour celles qui ont plus de difficultés à tout assumer (3 enfants, 1 mari, une créa d'entreprise, des heures de transports, de tout petits moyens financiers, pas de famille à proximité). Et je préfère être une mère indigne qu'une mère parfaite qui n'assume rien. A mon sens, on peut revendiquer le terme de mère indigne comme on revendique celui de gouine: on n'enfonce pas les hétéros, on explique qu'on est différente et qu'on a le droit de l'être...

Ce qui m'énerve en revanche, c'est en effet l'image véhiculée par les blogs des femmes trentenaires treu belles, treu créatives et treu aimantes. Et ce qui m'énerve encore plus, c'est l'idée qu'elles sont un modèle auquel tellement de filles voudraient ressembler...

Carole, loiiiiiiiiin d'être une bonne mère, je suis de toute façons la seule dont mes enfants disposent ;)

Cristalle a dit…

Ben, là t'as tout dit.
Donc pas de commentaire de plus.
J'ai beaucoup flippé et je flippe toujours autant pour ma fille mais si je veux vivre sereinement ma vie de mère, j'apprends chaque jour à accepter qui je suis et surtout à l'assumer. Ma fille est un petit bout pleine de joie parce que moi je vais bien. Et comme le dit Carole, de toutes les façons, elle n'a que moi.

Anonyme a dit…

je suis d'accord avec les commentaires, nous SOMMES tout simplement. Mais moi de là à accepter ce que je suis et comme je suis avec mes enfants il y a un grand pas... peut être un jour j'y arriverais... j'ai bien conscience que de ça dépend la santé mentale des enfants mais c'est pas pour ça que c'est facile. merci pour ce blog plein de simplicité.

Nekochan a dit…

et si, au lieu d'être une bonne mère ou une mauvaise mère, et si nous étions des mères suffisamment bonnes et imparfaites, c'est à dire nous tout simplement ?

LaFéeDuLac a dit…

Je suis on ne peut plus d'accord avec toi et j'ai fait aussi un article sur le sujet dans mon blog ces derniers jours. Le concept de "mère indigne" me hérisse !

Ilse a dit…

@ Titsev: La confiance et l'instinct. Tout à fait d'accord!
@ Odds'nEnds: j'ai surtout l'impression que tu es une mère normale et que tes "copines" mères parfaites sont des grosses malades! Je ne dit pas que les mères parfaites sont les mères idéales à suivre, j'ai juste du mal avec un label qui devrait être créé pour déculpabiliser. On est normales, on n'est pas indignes. Et très juste, ils n'ont que nous et on est la perfection incarnée à leurs yeux... parfois... ^^
@ Cristalle et @ Anonyme: oui c'est dur de s'accepter et d'accepter ses limitations, tout un défi en effet. Moi je trouve que tu fais un travail admirable en tout cas!
@ Nekochan: et voilà, tu as tout à fait compris ce que j'essaie de dire ^^
@ LaFéeDuLac: no comment ^^

La Tellectuelle a dit…

Ah ben voilà qu'on n'est pas du tout d'accord !

Le concept de mère indigne, c'est personnellement ce qui m'a permis de sortir de cette chape de plomb qui pesait sur mes épaules de "fille de femme au foyer qui a tout sacrifié à ses enfants".

A tel point que j'ai dévoré le livre de Caroline desages "Comment être une bonne mère indigne" (mais si tu la connais, c'est LA Caroline de Pensées de ronde).

ET au fait, econcept de Père Parfait existe, c'est le fameux "nouveau père" dont on nous rebat les oreilles. Il serait temps que les pères aussi se rebellent contre ça.

Maman Sioux a dit…

Juste un petit mot pour dire que cet article est très bien vu (comme celui sur la répartition des tâches / les priorités des hommes et femmes dans le couple, que j'avais forwardé à plein de gens) et que j'adhère !
Et aussi pour répondre à Odds'nEnds : mais qui a dit que c'était mal les lasagnes surgelées ? ou un peu de DS ? C'est pas parce qu'on est des mères qu'on doit devenir des robots au service des enfants ou de toutes la maisonnée. On a nos limites, on a aussi d'autres aspirations dans la vie, malgré tout l'amour (et il est immense !!!) que l'on porte à nos chérubins !
Et franchement, elles craignent les mères que tu décris, je suis peut-être naïve mais leur attitude me fait halluciner.